jeudi 14 février 2008

union onirique

Paris... saturée d'impatience, assise entre une femme qui s'endort et une famille bruyante, triste spectacle... mais elle ne les voit presque pas, pour ma délicate Elia, le temps semble s'être arrêté, les aiguilles de la grande horloge centrale ont ralenti et la narguent, dansent longuement avant de sauter d'une seconde à l'autre... quand enfin se fait entendre la phrase tant attendue, la phrase de la liberté : "les passagers du vol 807 en direction de Porto Alegre sont priés de se diriger porte 126"... elle suit la direction indiquée, avec énormément de mal à se retenir de courir ventre à terre pour atteindre la porte d'embarquement la première, mais ça ne changera rien, elle le sait, alors elle s'aligne sagement sur le rythme général, et se retrouve au milieu d'une file de personnes ordinaires... l'avion ira plus loin que sa destination annoncée, ça aussi elle le sait, il la mènera bien au-delà des rêves paradisiaques du commun des mortels... elle scrute tout autour, anxieuse, sondant les regards pour entrevoir la moindre étincelle qui trahirait un vrai compagnon de route... tout le monde autour est excité de quitter son quotidien banal et éreintant, c'est quand même quinze jours sans travail, sans doute dans un village de vacances quelconque... Elia ne fuit pas la même chose qu'eux, d'ailleurs, elle n'a jamais réellement travaillé, mais elle n'a que vingt ans... disons simplement qu'elle fuit son avenir, elle ne veut pas être comme eux, assommés de responsabilités, assujettis à des habitudes, comprimés dans une vie bien réglée : travail, famille, et pourquoi pas patrie aussi ?... non, ma petite Elia n'a pas d'appartenance, sa patrie c'est partout et nulle part, c'est autant l'endroit d'où elle vient que celui dans lequel elle se rend... quand l'avion décolle, elle essaye de se convaincre de dormir, sans pourtant s'empêcher d'examiner les autres passagers... et finalement, voilà Porto Alegre, après une quinzaine d'heures de vol et une escale, tout le monde descend... restent dans l'avion Elia, accompagnée de deux hommes très minces et barbus ainsi qu'une fille qui semble avoir son âge, et enfin, elle lit dans leurs yeux la flamme qu'elle cherchait plus tôt, et des sourires extraordinaires et tellement sincères...
"les portes se referment, l'avion se remplit d'un gaz jaune très dense, qui fait entrer dans nos corps une légèreté jamais ressentie, et un sentiment de plénitude qui nous éloigne encore de la terre des hommes, de l'individualisme et du matérialisme... à ce moment précis, seuls les rêves comptent, nos quatre esprits conjugués créent des images tellement spectaculaires, des paysages tellement fantastiques, et des gens tellement plus humains que tous ceux qu'on a pu rencontrer jusque là... je veux rêver toujours..."

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