dimanche 20 janvier 2008

acide éthylique

Etrange sensation que celle de t'endormir dans les bras d'un lointain souvenir que tu te forces à évacuer de ta mémoire... Etrange nuit au-dessus de laquelle tourbillonnent une horde de non-dits... Des maux que tu as enveloppés dans des chiffons immaculés, et dissimulés au plus profond de ta cage thoracique... Des mots que tu refuses de laisser aller rebondir sur les eaux calmes du canal de tes larmes... A présent, il y a sur ses lèvres quelque chose qui te rappelle qu'un jour tu as représenté bien des espoirs, et que tu ne signifies plus rien... Quel abri sera assez grand pour contenir ton passé petite Elia ? Comment vas-tu faire quand le présent que tu peines à affronter deviendra à son tour révolu ? Tu t'es enchaînée à un boulet psychologique dont tu ne peux plus te défaire, et que tu fais croître de jour en jour... Regarde en avant ma princesse, ne te retournes plus... Relève le menton, tu deviendras assez solide pour observer la douleur et l'endormir en ton sein... Tu auras la sagesse de regarder le monde en face et de semer sous la pluie les larmes qui trempent tes jolies joues, tu pourras te libérer des sanglots qui durcissent ton regard charmeur et ternissent la douceur de ton sourire... Oublie, mystérieuse petite Elia, oublie...

vendredi 18 janvier 2008

fée des bulles

« Il était une fois »… c’est comme ça que les contes de fées commencent, et souvent, ils finissent bien, alors peut-être que si tout le monde débutait sa journée en prononçant ces mots, la vie serait plus supportable ; peut-être que la Terre entière deviendrait soudainement heureuse …Peut-être que la jeune fille qui attend depuis des mois recroquevillée dans son lit d’hôpital verrai sa patience récompensée, peut-être que son petit frère ne serait pas obligé de voler chaque jour une pomme pour ne pas s’écrouler sur le bitume au moindre pas tremblant qu’il effectue, et sa grand-mère, qui habite à l’avant dernier étage d’un bâtiment nauséabond qu’elle n’a jamais quitté, peut-être trouverait-elle enfin un petit paradis pour attendre la conclusion de son voyage à travers l’existence… Et chacun se sentirait à sa place, enterrant les horreurs vécues et barrant la route à celles qui se pressent aux portes du Présent...

samedi 12 janvier 2008

no(s) future(s)

Funambule, tu marches sur le fil de ta vie, celui qui relie ta naissance à ta mort, tu essaies de rester dessus longtemps, de ne surtout pas tomber trop tôt... Tu te concentres le plus possible, regardes fixement cette ligne droite dont tu ne connais pas la longueur, tu ne sais pas combien de temps tu auras le droit d'être en suspension là-haut au-dessus de nos têtes... Oui tu ne la quittes pas des yeux une seule seconde, c'est ton passé, ton présent, ton futur, tout y est clair il n'y a aucune alternative, et tu ne veux pas déraper... Tu crains de glisser et te retrouver au sol, parmi nous ; non à cause de la douleur de la chute, mais seulement parce qu'en bas tu te sentiras perdu, tu ne sauras plus quelle ligne suivre, elles s'entremêlent toutes de manière totalement aléatoire, nos lignes à nous, elles zigzaguent... Alors si c'est là ta plus grande peur, continue à ne pas prendre de risques, suit inlassablement ta ligne, faufile-toi à l'intérieur de ton être et recueille tes larmes, car ne dit-on pas que le plus court chemin est toujours la ligne droite ?...

jeudi 10 janvier 2008

vole petite Elia, je souffle dans tes ailes

Enfermée en lévitation dans une grosse bulle de savon qui brille de mille étoiles multicolores, le regard posé vers le bas tandis qu'elle s'élève, émerveillée... Jolie petite Elia, intouchable, protégée des épines menaçantes du monde qu'elle vient de laisser sous ses petits pieds, envoyant au vent des sourires discrets...
Elle lui semble belle la Terre, vue de tout là-haut... Innocente petite Elia, à ses yeux la misère disparaît,
les douleurs ne semblent pas si violentes ; et ces petits pantins qui hurlent à la vie, à genoux dans la boue jusqu'au nombril, elle les voit à peine...
D'où elle se trouve, elle ne se souvient même plus de son petit corps en pleurs, recroquevillé sous le toit rouge de cette cabane sordide... Sombre petite Elia au coeur cassé en mille morceaux, répandu au sol parmi les bouteilles vides, les photos brûlées et les lettres déchirées... On lui avait pourtant dit quand elle était petite, l'amour est le seul rêve qui ne peut se rêver...
Maintenant tu peux oublier, maintenant je t'ai fabriqué cette bulle qui jamais ne s'écrasera... A
ngélique petite Elia, continue à envoyer tes sourires en espérant qu'un jour il y en ait un qui s'égare et parvienne à réchauffer un coeur blessé avant qu'il ne se brise...

mardi 8 janvier 2008

vertigineuse

Alice a le don de la métamorphose,
Elle peut se transformer, et rien ne s'y oppose,
Alice a le don.
Alice a le doigt qui se perd sur le globe
Elle suit le tracé des rivières, et traverse la Terre,
Alice a le doigt.
Alice se frotte à l'immersion
Et au diadème solaire, enfin à d'autres visions.
Alice se frotte... Allez Alice se frotte.
Assise au milieu des ondes, Alice est féconde,
A dada sur son monde, elle envoie ses flèches.
A la fin oui tout s'explique, rêve et mécanique,
Le ciel électrique des télévisions.
Alice se regarde alanguie sur son plume,
Elle a tant flotté dans l'ether qu'elle arrive à la lune
Alice veut le meilleur.
Alice fait sa nuit dans les villes enchantées
Et elle se réveille au matin sur des terres brulées,
Alice fait sa nuit.
Quand sur ses ailes d'acier, dans des lits d'initiés,
Elle sent le point du jour, elle a fait le tour.
Alice se sort de la faille, et revient à sa taille,
Alors le monde entier redevient normal,
Alice est comme ça.

[Noir Désir - Alice]

samedi 5 janvier 2008

tremblements

Lorsque tu fermeras mes yeux à la lumière,
Baise-les longuement, car il t'auront donné
Tout ce qui peut tenir d'amour passionné
Dans le dernier regard de leur ferveur dernière.

Sous l'immobile éclat du funèbre flambeau,
Penche vers leur adieu ton triste et beau visage
Pour que s'imprime et dure en eux la seule image
Qu'ils garderont dans le tombeau.

Et que je sente, avant que le cercueil ne se cloue,
Sue le lit pur et blanc se rejoindre nos mains,
Et que près de mon front, sur les pâles coussins,
Une suprême fois se repose sur ta joue.

Et qu'après je m'en aille au loin avec mon coeur
Qui te conservera une flamme si forte
Que même à travers la terre compacte et morte
Les autres morts en sentiront l'ardeur.

[Emile Verhaeren - Lorsque tu fermeras mes yeux...]

adieux

tu t'es échappé trop loin, la vie ne te tentait pas, alors tu as trouvé la solution, la réponse parfaite, partir tout en faisant semblant de rester, liquéfier des petits cailloux de rêve pour les intégrer dans tes veines... mais c'est bien trop facile, c'est pas comme ça que ça marche, la vie... en vrai elle s'en fout de ta belle gueule la vie, elle les voit même pas tes beaux yeux, faut te battre, faut souffrir, faut tomber pour avoir le droit de te relever... et c'est pas du bonheur artificiel qui te donne un sourire sincère, c'est justement la vie, celle que tu as délaissée, sur laquelle tu as tant craché, c'est elle seule qui peut te faire sourire, il suffit d'en avoir envie... mais nan toi t'as tourné le dos à tout, tu es enfermé dans ton monde blanc, un rêve attrayant qui s'est rapidement transformé en survivance macabre, tu voulais être libre alors tu as lâché ma main de peur que je m'enterre avec toi dans le trou que tu t'étais creusé, et tu es parti... je suis tombée de bien moins haut, je mets timidement un pied devant l'autre, tout doucement, mais je me suis relevée, j'ai décidé d'avancer... et je sais que tu ne reviendras jamais...

mais quand ?

Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale
Ca sera par un soir horrible
Clair, chaud, parfumé, sensuel
Je mourrai d'un pourissement
De certaines cellules peu connues
Je mourrai d'une jambe arrachée
Par un rat géant jailli d'un trou géant
Je mourrai de cent coupures
Le ciel sera tombé sur moi
Ca se brise comme une vitre lourde
Je mourrai d'un éclat de voix
Crevant mes oreilles
Je mourrai de blessures sourdes
Infligées à deux heures du matin
Par des tueurs indécis et chauves
Je mourrai sans m'apercevoir
Que je meurs, je mourrai
Enseveli sous les ruines sèches
De mille mètres de coton écroulé
Je mourrai noyé dans l'huile de vidange
Foulé aux pieds par des bêtes indifférentes
Et, juste après, par des bêtes différentes
Je mourrai nu, ou vêtu de toile rouge
Ou cousu dans un sac avec des lames de rasoir
Je mourrai peut-être sans m'en faire
Du vernis à ongles aux doigts de pied
Et des larmes plein les mains
Et des larmes plein les mains
Je mourrai quand on décollera
Mes paupières sous un soleil enragé
Quand on me dira lentement
Des méchancetés à l'oreille
Je mourrai de voir torturer des enfants
Et des hommes étonnés et blêmes
Je mourrai rongé vivant par des vers
Je mourrai les mains attachéessous une cascade
Je mourrai dans un incendie triste
Je mourrai un peu, beaucoup,
Sans passion, mais avec intêret
Et puis quand tout sera fini
Je mourrai.

[Boris Vian - Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale]

jeudi 3 janvier 2008

oublier qu'on ne peut oublier

m'en aller, suivre un sentier, n'importe lequel, marcher le nez en l'air, les yeux captivés par les nuages qui dansent, sentir l'herbe se coucher sous mes pieds nus, et le vent parcourir mon visage, juste comme ça... juste pour oublier que j'oublierai jamais, qu'il y a des choses qui resteront en moi quoi que je fasse...
toi t'es tout loin au bout d'une longue bande d'asphalte, et entre nous, qu'est-ce qu'il y a encore qui risque de s'écrouler, d'exploser, de brûler, de fondre, ou d'être détruit de n'importe quelle manière ?
sors moi du labyrinthe de mes obscures pensées, laisse-moi effleurer tes ailes du bout de mes doigts tremblants, ne m'abandonnes pas face à l'étendue glaciale que j'ai moi-même façonnée par mes confusions et mes erreurs... je ne comprendrai jamais rien de l'étrange histoire de ma vie tant qu'il y aura cette violente lumière blanche qui m'aveuglera...